L’artiste Nathalie Kho à propos des secrets du Diable du Père-Lachaise

L’artiste Nathalie Kho sur les illustrations du Diable du Père-Lachaise

“Pourquoi ne pas dessiner le Diable ! me dit Olga. J’ai répondu “Oui” et j’ai commencé à me demander dans quoi je m’embarquais.

Dans mon esprit, cette histoire était aussi sombre et trouble qu’un minuit de décembre, lorsqu’elle a vu le jour, d’abord sous la forme d’une nouvelle.

Je me souviens très bien de la soirée. Olya l’avait pimentée avec la lumière de la dangereuse et enivrante lune, toute stupéfiante, la saveur des siècles étoilés et l’éclair éblouissant d’une comète déchirant le ventre de la Voie lactée. Des bougies ont été allumées. Nous avons bu du rosé et le conte a pris vie sous nos yeux.

“Comment dessiner tout cela ? – me suis-je demandé. – Ces diamants d’étoiles qui se jettent dans un bourgeon sanguinolent, enfermé dans la poitrine du Diable comme dans une cage.  Enfin, cette statue. Tout doit être en couleur !”  Bref, une chose est conçue, mais un an et demi plus tard, c’est une toute autre chose qui se dessine. “Je me suis dit que je souffrais de l’imperfection, comme le personnage principal de l’histoire, de l’impossibilité d’atteindre ma Belle Statue.  Et j’ai refait, refait, refaçonné… Je dois vous dire que je ne suis pas une artiste professionnelle. Je suis une décoratrice de vie professionnelle ! J’abandonne donc ma cuisine artistique facilement et sans gêne – le plus important est qu’elle était délicieuse et qu’il y avait beaucoup d’ornements !

Quoi qu’il en soit, le premier tableau était “Sabbat” et comme on me dit souvent que mes dessins ressemblent à des motifs de Marc Chagall (je suis toujours d’accord, c’est un compliment inouï pour moi, pourquoi ne le serais-je pas), j’ai décidé cette fois-ci de profiter de l’occasion pour faire un dessin. Cette fois-ci, j’ai décidé d’en profiter et je me suis dit, bon, que Chagall m’inspire vraiment cette fois-ci.  Je suis donc allée à l’Opéra pour déclarer une fois de plus mon amour au célèbre plafond. Et puis Notre Dame est apparue sur l’épaule de la sorcière et je l’ai brûlée. Le plus étonnant, c’est qu’après, notre belle dame a vraiment brûlé… C’est comme ça que ça se passe.

Et puis il y a eu Gustav Klimt et Egon Schille. Je suis tombé amoureux du premier pour toujours et irrévocablement lorsque j’ai vu les originaux de ses tableaux au Belvédère de Vienne. J’ai trouvé une copie du second dans un cadre noirci par le temps sur un marché aux puces de Saint-Maurice. Pour réaliser une illustration savoureuse de Jim et la Sorcière Tegnasse, j’ai “volé” l’ornement à Gustav Klimt et le couple d’amoureux à Egon Schille, en y ajoutant des pommes de paradis et de la sauce à l’encre.  C’est ainsi qu’est né Hommage à Egon Schiele.

Le triste dandy Oscar est arrivé tout à fait par hasard. C’était un dessert que je n’avais absolument pas l’intention de dessiner.  En relisant A Tale of Soul et The Portrait of Dorian Gray, j’ai passé deux mois à dessiner Oscar arborant un magnifique et époustouflant costume de plumes. Mais à la fin, il ne restait plus que la tête. Ou plutôt la moitié d’une tête. Et c’est ce qui est devenu la couverture.

Et l’illustration “Stargazer” complète le menu de mes “favoris”. Cette fois, je n’ai pas pu résister à l’envie de réaliser ma recette préférée avec des ornements et des pierres précieuses d’Asie centrale ! 

Ah oui, et aussi Jim. Jim a été très turbulent. Sa silhouette se promenait d’un croquis à l’autre en dansant, brandissant une bouteille de vin avec des monogrammes d’os, ou un gobelet en forme de tête de mort, mais tout semblait faux. Pour moi, tout le mystère de Jim résidait dans son regard. Noir et sans fond.

Dans le livre, vous verrez aussi le Pêcher fou et le diable en personne, la lune et la statue, mais je ne révélerai pas ces recettes, vous aurez donc l’occasion d’inventer vous-même les histoires qui se cachent derrière elles !

Votre Natasha Kho

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